Mascarons de Bordeaux
Masque - Mascharone - Mascara

Le mascaron : « est une tête chargée ou ridicule, faite à fantaisie, comme une grimace, qu'on met aux portes, grottes, fontaines… Ce
mot vient de l'italien Mascharone, fait de l'arabe Mascara, bouffonnerie ».
Leur fonction était, à l'origine, d'éloigner les mauvais esprits afin qu'ils ne pénètrent pas dans la
demeure.
Les mascarons font une entrée timide à Bordeaux aux XVIe et XVIIe siècles puis la mode des mascarons explose au XVIIIe siècle.
L'écrivain bordelais Michel Suffran évoque « une ville entière de masques » et un « théâtre chimérique ».
La couverture du livre
Puis la bougeoisie adopte cet usage pour marquer leur identité. Ils sont souvent apposés sur la clef de voûte des arcs des fenêtres ou des portes ou sur les linteaux.
« Et la pierre s'est faîte chair, masques sans visage, visages sans masque ? Il faut se hâter de les visiter car même les mascarons peuvent mourir, la pierre se patine,
se fissure, victime de la pollution et du temps qui passe ».
En Bordeaux on en compte 3000.
Masques ou mascarons au XVIIe siècle, les hommes de l'art distinguent les mascarons des masques.
Ainsi, en 1691, selon Augustin-Charles d'Aviler :
Le masque : « C'est une tête d'homme ou de femme, sculptée à la clef d'une arcade. Il y en a qui représente des Divinités, des
saisons, les éléments, les âges, les tempéraments avec leurs attributs, comme on en voit au château de Versailles du côté du
jardin, à la colonnade ».
Le mascaron : « est une tête chargée ou ridicule, faite à fantaisie, comme une grimace, qu'on met aux portes, grottes, fontaines…
Ce mot vient de l'italien Mascharone, fait de l'arabe Mascara, bouffonnerie ».
Malgré l'étymologie discutable, ces définitions ont le mérite d'expliciter une différence de fond entre le mascaron et le masque.
Le mascaron est une bouffonnerie, une caricature qu'il faut réserver à des ouvrages secondaires. Le masque est une décoration de
bon goût sur la façade d'un hôtel particulier, d'un palais. L'Académie royale d'architecture édicta des recommandations en
conformité avec ces définitions.
Toutefois, dans la pratique, masques et mascarons finiront par se fondre dans la fonction commune de décoration et de divertissement
des passants. Lors de la réalisation de la place de la Place de la Bourse les devis utiliseront seulement le terme de « tête ».
En architecture, un mascaron est un ornement dont les inspirations sont multiples : aux traditionnels Neptune et Bacchus s'ajoutent
des animaux fantastiques, des figures féminines, des visages du caranaval, des anges, des fauves… Les mascarons bordelais reflètent aussi
l'histoire de la ville avec la reproduction de visages africains en référence à la traite négrière, l'intégration de symboles maçonniques, chrétiens ou juifs.
Décoration vivace et fantaisiste par nature, le mascaron permet d'animer la rigueur géométrique des façades en s'intégrant aux
décors architecturaux. Ils sont souvent apposés sur la clef de voûte des arcs des fenêtres ou des portes ou sur les linteaux.
Des mascarons délivrent l'eau d'une fontaine.
Place royale (place de la bourse) Gabriel fait venir de Paris les sculpteurs qui décoreront la place et réaliseront les
marscarons. Dans un premier temps, le Flamand Jacques Verbeckt (1704-1771), qui est intervenu à Versailles, dirige Van der Woort
et six sculpteurs. Entre 1733 et 1740, Van der Woort intervient sur les frontons de l'hôtel des Fermes, et son équipe s'attache à
la décoration des façades avec des mascarons et agrafes, chapiteaux des colonnes et pilastres, trophées et vases des balcons.
Puis le sculpteur bordelais Pierre Vernet poursuit le travail. Enfin de 1748 à 1755, le sculpteur Claude-Clair Francin (1702-1773)
réalise le fronton central et les quatre frontons de la Bourse, avec ses compagnons, il termine la décoration de la place.
La
franc-maçonnerie
solidement implantée en Angleterre au début du XVIIIe siècle, se développe en France avec les premières
loges parisiennes vers 1726. À Bordeaux la première loge anglaise a été créée en 1732. Selon les travaux de Johel Coutura, Bordeaux
accueillait plus de 2 000 maçons à la fin du XVIIIe siècle17. Ainsi, en 1745, Étienne Morin, négociant entre les Antilles et Bordeaux,
fonda la Loge écossaise de Bordeaux. Le 4 juillet 1804, Alexandre François Auguste, comte de Grasse, marquis de Tilly, installe à Bordeaux
le Rite Écossais ancien accepté.
Traite négrière et exotisme
, la traite négrière participa à la richesse de la ville de Bordeaux avec le commerce
triangulaire. Des mascarons gardent la mémoire de ce commerce. Ainsi un visage africain portant des boucles d'oreilles est sculpté
sur une façade de la rue d'Aviau à proximité du jardin public. Le visage d'une femme qu'on suppose noire est reproduite sur les façades du
pavillon central de la place de la Bourse, quai Richelieu.